Au bord d'un matin rose ou le long d'un couchant,
Le port sera empli de regards affichant
Notre humeur onirique ; et nos pas éveillés,
Nonchalance accomplie, glissant émerveillés
Sur la chaleur ouatée, nous porteront magiques
Au quai d'embarquement vers le navire unique
Caché dans la forêt de vergues coutumières
Les grandes mâtures noyées dans la lumière.
Humés par un instinct que nul n'a désigné,
Nous marcherons heureux d'y être résignés
Parmi les ballots, les colis et la foule,
La foule de nous deux, feston qui se déroule
Et va se répétant, ribambelle éblouie
Par celui qui, là-bas, pour l'île réjouie,
Tend déjà ses antennes, ramures familières,
Les grandes mâtures noyées dans la lumière.
L'air est doré, aussi les pavés, les façades.
Les magasins cossus, comme pour la parade,
Irradient la douceur d'une tiédeur sucrée.
Tandis que la houle meurt en éclat diapré,
Les vaisseaux resserrés en désordre savant
Mêlent, en contre jour, leurs longs filins mouvants,
Leurs toiles alanguies où se dressent, derrière,
Les grandes mâtures noyées dans 1a lumière.
Allons, partons, marchons où le rêve nous porte.
Le soleil qui s'enflamme avec lui nous emporte.
Soyons guidés, là-bas, vers nos visions premières,
Les grandes mâtures noyées dans la lumière.
14/10/36
2014
Edition Mélibée
392 pages
Pour Jean Durier-Le Roux, lors de son activité professionnelle, le plus grand moment de plaisir jubilatoire quotidien, c'était la cantine. Là, avec une demi-douzaine de galapiats de son espèce, il refaisait le monde. Et puis, la retraite est arrivée : plus de débats dialectiques passionnés. Alors, en toute humilité, il a décidé d'écrire ce qu'il aurait pu défendre véhémentement. Un nouveau problème s'est présenté. Jean Durier-Le Roux s'est souvenu du devoir de philosophie inhérent à la classe de terminale : « Peut-on penser par soi-même ». Il essaie. Ça, pour essayer, il essaie. Même, parfois, il a l'impression d'y arriver... Et là, son narcissisme s'en trouve revalorisé. De quoi se préoccupe-t-il ? A priori de n'importe quoi. Toutefois, il faut bien l'avouer, les sujets liés à la situation sociopolitique reviennent de façon récurrente. Est-ce à regretter ? Aristote, dans le premier chapitre de l'Éthique à Nicomaque, montre que le plus haut niveau de réflexion philosophique que l'on puisse avoir est celui qui concerne le politique. Alors, si c'est Aristote qui le dit...