Au début était
Le commencement.
Mais,
Ça n'a pas duré.
C'est dommage.
Parce que c'était bien parti.
Tout était organisé
Le bang s'avérait très big
Tout aussi big que bang.
Bref,
On était satisfait.
Mais, c'est après
Que ça s'est dégradé.
Le bang a été de moins en moins big
Et plus moyen de rebiguer le bang.
Alors les épingles
N'en ont fait qu'à leur tête,
Les pieds d'alouette
On piétiné les plates bandes,
Les personnalités des agents doubles
Se sont dédoublées,
La fosse au lion
A perdu son aisance,
Et la téléphonie sans fil
S'est prise pour un haricot vert.
Non, vraiment
C'était plus ça.
On a inventé des tas de choses
Un peu de ci,
Un peu de ça,
Pour s'occuper,
Pour occuper aussi
Pour faire croire qu'on s'occupait du cas,
Mais, foin de balivernes,
Il faut bien s'y résoudre,
On a subit un dérapage
Et on ne s'en remet pas.
Alors, on dit : c'est la faute
Des anticyclones
Des anti-chocs
Des anticoagulants
Des anti-choses
Des antiquaires
On dit qu'on ira
Rétablir l'ordre
Et que si on n'y va pas
C'est qu'on n'est pas très sûr
De pouvoir y aller.
On dit qu'on sait très bien
Ce qu'il faut dire
Mais qu'on s'abstient.
Alors tout s'éparpille
La chine est de plus en plus
Peuplée de chinois,
Les mines de rien sont
De plus en plus minables
Et les mines de gruyère
Complètement minées.
Et voilà.
Voilà qu'un univers
Qui se présentait bien,
En pleine force de l'âge,
Même pas très expansé
Se trémousse et s'agite
Comme si tous les mille-pattes
Sautaient à cloche pieds
En rigolant bêtement.
Vous avouerez
Qu'il y a de quoi être déçu
Les grues ont des pieds de biche
Et les biches font le pied de grue,
Les hommes de main
De sac et de corde
Coupent les cordes
Des sacs à main.
Les épouvantails
Taillent pour que
L'épouvante aille.
Les trains de marchandises
Deviennent des trains de mesures
Et la mesure est comble
Dans la mesure
Où on la traîne.
La culture générale
N'est même plus potagère;
La mère de tous les vices
Est placée sous écrou
Et la mer des Sargasse
Rendue à son époux.
Les lentilles d'eau
Ne grossissent plus le droit d'aînesse
La barbe des vieillards
Veille sur les barbares;
Les sauts de moutons
De saut de puce
En sceau de Salomon
Lissent les fleurs de haute lisse,
Eveillent les lieux de rêve,
Noient les chats nouveau-nés,
Croquent à belle dent
Les poires pour la soif,
Gardent un chien de leur chienne,
Et tarissent la poule aux oeufs d'or.
Alors, ç'en est fait.
On restructure
On redéploie
On décentralise
On reprojette
On rétrospecte
On tape sur les doigts
On se débat
On standardise
On aplanit
On puérilise
On croit qu'on croit ce qu'on voit
On mécanise
On automatise
On électronise
On informatise
Et même si on accélère
Les particules
Il n'est de progrès
Que pour n'importe quoi.
24.03.95.
Pour Jean Durier-Le Roux, lors de son activité professionnelle, le plus grand moment de plaisir jubilatoire quotidien, c'était la cantine. Là, avec une demi-douzaine de galapiats de son espèce, il refaisait le monde. Et puis, la retraite est arrivée : plus de débats dialectiques passionnés. Alors, en toute humilité, il a décidé d'écrire ce qu'il aurait pu défendre véhémentement. Un nouveau problème s'est présenté. Jean Durier-Le Roux s'est souvenu du devoir de philosophie inhérent à la classe de terminale : « Peut-on penser par soi-même ». Il essaie. Ça, pour essayer, il essaie. Même, parfois, il a l'impression d'y arriver... Et là, son narcissisme s'en trouve revalorisé. De quoi se préoccupe-t-il ? A priori de n'importe quoi. Toutefois, il faut bien l'avouer, les sujets liés à la situation sociopolitique reviennent de façon récurrente. Est-ce à regretter ? Aristote, dans le premier chapitre de l'Éthique à Nicomaque, montre que le plus haut niveau de réflexion philosophique que l'on puisse avoir est celui qui concerne le politique. Alors, si c'est Aristote qui le dit...