Prologue
Une voiture passe;
Elle est passée...
Tant pis.
Suite
Un conseil:
Si vous voulez vous amuser,
Ou amuser les autres,
Dans de joyeuses soirées:
Vous reprenez le prologue,
Et vous le resservez.
Mais,
Pour n’être pas plagiaire,
Et montrer votre imagination,
Et votre créativité,
Vous remplacez la voiture
Par un quelconque concept
Qui puisse être mobile,
Et vous y allez.
Un plat de petits pois passe;
Il est passé...
Tant pis.
Bon,
Vous vous adaptez à la situation;
Vous collez à l’événement,
Ou vous vous en distancez.
De toute façon,
C’est toujours bon.
Un caméléon,
Un échassier déprimé,
Un hippopotame nain,
Un numismate fatigué,
Un clown habillé en Jules César
Qui pense à l’archidiacre
De Trésigny la foire:
Tout ça, c’est aussi efficace.
Même,
Dans le fond,
Les choses immobiles
Vous rendront un tantinet
Surréaliste.
Un immeuble de la seizième avenue,
L’ombre de la tour de Pise,
Le quai d’embarquement des ferries
Pour Tamanrasset,
Et j’en passe.
Je suggérais,
Juste,
Quelques idées.
Vous voyez, c’est magnifique.
On peut généraliser.
D’ailleurs,
On peut très bien dire:
N’importe quoi passe;
Il est passé...
Tant pis.
On peut généraliser,
Donc,
C’est une pensée universelle.
On peut même
Tellement
Généraliser,
Qu’à la place de tant pis,
On pourrait dire tant mieux.
Cela ne changerait pas grand’ chose;
Et, on ne pourrait même pas
Affirmer
Que l’un est plus
Optimiste ou pessimiste que l’autre.
Cela dépend de ce qui passe.
Alors, essayons de généraliser encore:
N’importe quoi passe;
Il est passé...
Tant: Ce que vous voulez.
La, ça marche moins bien.
La généralisation complète,
La généralisation magnifique,
La généralisation superbe,
La généralisation définitive,
La généralisation générale,
Non.
Tant pis.
Suite et fin
Une paire de souliers vernis passe;
Elle est passée...
Si vous êtes une dame
(Ou une demoiselle),
A quoi avez-vous songé?
Si vous êtes un monsieur,
A quoi avez-vous songé?
Dans les deux cas,
C’était l’autre.
Perdu!
Tant pis.
11/12/97
2014
Edition Mélibée
392 pages
Pour Jean Durier-Le Roux, lors de son activité professionnelle, le plus grand moment de plaisir jubilatoire quotidien, c'était la cantine. Là, avec une demi-douzaine de galapiats de son espèce, il refaisait le monde. Et puis, la retraite est arrivée : plus de débats dialectiques passionnés. Alors, en toute humilité, il a décidé d'écrire ce qu'il aurait pu défendre véhémentement. Un nouveau problème s'est présenté. Jean Durier-Le Roux s'est souvenu du devoir de philosophie inhérent à la classe de terminale : « Peut-on penser par soi-même ». Il essaie. Ça, pour essayer, il essaie. Même, parfois, il a l'impression d'y arriver... Et là, son narcissisme s'en trouve revalorisé. De quoi se préoccupe-t-il ? A priori de n'importe quoi. Toutefois, il faut bien l'avouer, les sujets liés à la situation sociopolitique reviennent de façon récurrente. Est-ce à regretter ? Aristote, dans le premier chapitre de l'Éthique à Nicomaque, montre que le plus haut niveau de réflexion philosophique que l'on puisse avoir est celui qui concerne le politique. Alors, si c'est Aristote qui le dit...