Depuis un temps incertain
Et intemporalisé,
Le fleuve entraînait
Dans sa masse ondoyante
Un corps devenu lui même liquide.
A midi, il avait bu un café
Décaféiné
Edulcoré avec du sucre
Désucrifié.
Et avant cela, il avait mangé
Une grillade reconstituée
A la crème dégraissée
Pour accompagner,
Il avait pris des petits légumes
Sans sauce
Avec du sel
Désalinifié
Et du poivre
Dépoivréïné.
Il avait arrosé cela avec
De l'eau minérale
Déminéralisée.
Puis, il était reparti travailler.
Il avait instruit des dossiers
De façon désintéressée
En vu d'une réunion
Dépassionnée
Préparant un projet
Discrédité.
Le soir, il était sorti dans la foule
Déshumanisée.
Et depuis, il glissait dans le fleuve noir
Sous un ciel de mille étoiles
Désétoilisées
Saint Denis le15 12 00
2014
Edition Mélibée
392 pages
Pour Jean Durier-Le Roux, lors de son activité professionnelle, le plus grand moment de plaisir jubilatoire quotidien, c'était la cantine. Là, avec une demi-douzaine de galapiats de son espèce, il refaisait le monde. Et puis, la retraite est arrivée : plus de débats dialectiques passionnés. Alors, en toute humilité, il a décidé d'écrire ce qu'il aurait pu défendre véhémentement. Un nouveau problème s'est présenté. Jean Durier-Le Roux s'est souvenu du devoir de philosophie inhérent à la classe de terminale : « Peut-on penser par soi-même ». Il essaie. Ça, pour essayer, il essaie. Même, parfois, il a l'impression d'y arriver... Et là, son narcissisme s'en trouve revalorisé. De quoi se préoccupe-t-il ? A priori de n'importe quoi. Toutefois, il faut bien l'avouer, les sujets liés à la situation sociopolitique reviennent de façon récurrente. Est-ce à regretter ? Aristote, dans le premier chapitre de l'Éthique à Nicomaque, montre que le plus haut niveau de réflexion philosophique que l'on puisse avoir est celui qui concerne le politique. Alors, si c'est Aristote qui le dit...